Les fondamentaux Obsolescence programmée

Les entreprises peuvent-elles limiter délibérément la durée de vie des produits ? En France, malgré une loi favorisant la réparation et la mise à disposition de pièces détachées, de nombreux appareils électriques et électroniques continuent de se périmer rapidement. Nom de code de ces techniques de production : obsolescence programmée. L’Ademe l’a définie comme « un stratagème par lequel un bien verrait sa durée normative sciemment réduite dès sa conception ». Résultat de ces pratiques peu éthiques, une consommation de masse et des déchets qui se ramassent à la pelle.

Qu’est-ce que l’obsolescence programmée ?

L’obsolescence programmée est une stratégie industrielle. Elle vise à réduire intentionnellement la durée de vie ou d’utilisation d’un produit pour inciter les consommateurs à en acheter régulièrement de nouveaux. L’obsolescence programmée repose sur la conception, la fabrication et la commercialisation de produits avec une durée de vie limitée, bien en deçà de leur potentiel technologique. Cette limitation intentionnelle peut être réalisée de différentes manières, comme :

  • utiliser des matériaux de moindre qualité ;
  • intégrer des composants susceptibles de s’user rapidement ;
  • limiter la disponibilité des pièces détachées nécessaires à la réparation.

La notion d’obsolescence programmée est souvent associée à un modèle économique basé sur la surconsommation et le renouvellement rapide des appareils. Ce modèle profite évidemment aux entreprises puisque la fréquence des achats multiplie les profits. D’un point de vue éthique, l’obsolescence programmée est perçue comme une forme de manipulation des consommateurs, les forçant à remplacer des produits qui devraient durer plus longtemps. De plus, elle contribue de manière significative à la génération de déchets et à la consommation excessive des ressources naturelles.

Comment l’obsolescence programmée est-elle apparue ?

L’obsolescence programmée trouve ses racines au début du XXe siècle, lorsque la production industrielle de masse prend son essor. Les entreprises cherchent alors à maximiser leurs profits. L’exemple le plus emblématique est celui de l’ampoule électrique. Dans les années 1920, le cartel Phœbus, qui regroupe les principaux fabricants d’ampoules, aurait convenu de limiter la durée de vie de ses produits à 1 000 heures. Pourtant, la technologie de l’époque permettait de produire des ampoules pouvant durer beaucoup plus longtemps.

Quelques années plus tard, en 1932, Bernard London publie un pamphlet à ce sujet. Il propose de légaliser l’obsolescence programmée pour relancer l’économie en berne de la Grande Dépression.

Après la Seconde Guerre mondiale, les entreprises adoptent des stratégies de marketing et de conception qui encouragent le remplacement régulier des produits. Les appareils électriques et électroniques voient leur durée de vie limitée au bon vouloir du profit.

Aujourd’hui, l’obsolescence programmée est un délit. Les fabricants doivent respecter des normes de durabilité et de réparabilité.

Les différentes formes d’obsolescence programmée

L’obsolescence programmée se manifeste sous diverses formes, chacune avec des mécanismes spécifiques pour limiter la durée de vie des produits.

  • L’obsolescence fonctionnelle ou technique se produit lorsque les produits sont conçus avec des composants de qualité inférieure ou des pièces qui s’usent rapidement. Le produit cesse de fonctionner dans un délai prévu par le fabricant.
  • L’obsolescence indirecte est liée à l’indisponibilité des pièces détachées ou du service après-vente. Les fabricants cessent de produire des pièces de rechange pour des modèles plus anciens, obligeant le consommateur à acheter un nouvel appareil.
  • L’obsolescence logicielle touche particulièrement les appareils électroniques, comme les smartphones ou les ordinateurs. Ils deviennent obsolètes parce qu’ils ne peuvent plus supporter les mises à jour du système d’exploitation ou des applications. 
  • L’obsolescence esthétique, psychologique ou de mode joue sur les tendances pour rendre les produits désuets. Les entreprises lancent régulièrement de nouveaux équipements avec des améliorations esthétiques mineures. Cette forme d’obsolescence est courante dans l’industrie de la mode, de l’automobile et des appareils électroniques.

 

Les conséquences de l’obsolescence programmée

L’obsolescence programmée affecte les consommateurs, l’environnement, l’économie et la société dans son ensemble.

La production de déchets électroniques porte préjudice à l’environnement

L’augmentation des déchets constitue l’une des conséquences les plus graves de l’obsolescence programmée. Les déchets d’équipements électriques et électroniques (DEEE) envahissent la planète. Un rapport de l’ONU estime à 62 millions de tonnes la production de déchets électroniques en 2022. Les décharges ploient sous les ex-stars du numérique. Beaucoup contiennent des matériaux toxiques qui contaminent les sols et les eaux souterraines. De plus, la fabrication de nouveaux appareils puise dans les ressources naturelles et produit des gaz à effet de serre.

Un prix à payer pour les consommateurs dépendants des fabricants

L’obsolescence programmée se cache parfois derrière l’argument d’un accès facilité à la consommation pour les plus démunis. Cependant, les articles « premier prix », destinés à périr prématurément, obligent les consommateurs à remplacer fréquemment leurs appareils électroniques. Au bout du compte, ils perdent en pouvoir d’achat.

Des pratiques de consommation bien loin de la réparabilité

La culture de consommation incite à acheter toujours plus et plus vite. L’obsolescence a programmé la fin de vie de nos appareils. Les nouveaux produits, valorisés par la publicité et les réseaux, deviennent des priorités à posséder. Pas loin de l’aliénation psychologique, nous sommes constamment poussés à acquérir le dernier modèle pour nous sentir satisfaits.

La garantie d’une durée de vie limitée pour les ressources de la planète

La demande accrue pour les derniers produits arrivés sur le marché exerce une pression sur les ressources naturelles. La production de biens de consommation nécessite l’extraction de matières premières, souvent de manière non durable. Preuve que l’obsolescence dégrade l’environnement, perturbe la biodiversité, et alimente des conflits liés aux ressources dans certaines régions du monde.

Comment les consommateurs peuvent-ils se protéger contre l’obsolescence programmée ?

Pour lutter contre l’obsolescence programmée, les consommateurs peuvent adopter plusieurs stratégies :

  • privilégier l’achat de produits de marques réputées pour leur durabilité et leur qualité ;
  • consulter les avis des utilisateurs pour identifier les produits les plus fiables ;
  • vérifier la disponibilité des pièces détachées et les services de réparation avant d’acheter un produit ;
  • se tourner vers les produits bénéficiant d’un bon indice de réparabilité, un outil de plus en plus utilisé pour évaluer la facilité de réparation des produits ;
  • recourir à la garantie pour allonger la durée de vie des appareils.

 

Existe-t-il des initiatives et des lois pour combattre ce phénomène ?

Plusieurs initiatives ont été mises en place pour combattre l’obsolescence programmée. En France, la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, adoptée en 2015, introduit des mesures pour lutter contre l’obsolescence programmée. Cette loi rend illégales les pratiques consistant à réduire délibérément la durée de vie d’un produit pour en augmenter le taux de remplacement. Les fabricants peuvent être sévèrement sanctionnés.

L’Union européenne a également adopté, en décembre 2023, un règlement sur l’écoconception pour améliorer la durabilité et la réparabilité des produits. Ce règlement établira des exigences de performance et d’information pour certains types de produits mis sur le marché européen.

Comment les entreprises justifient-elles l’obsolescence programmée ?

Les entreprises présentent souvent l’obsolescence programmée comme un moteur de croissance économique. En incitant les consommateurs à remplacer régulièrement leurs produits, les entreprises soutiendraient la production industrielle, l’emploi et l’activité économique.

Les entreprises avancent aussi l’argument que les cycles de renouvellement rapide des produits permettent d’apporter des améliorations continues, qui répondent aux attentes des consommateurs. Selon elles, cette dynamique encourage la concurrence, ce qui entraîne une baisse des prix et une hausse de la qualité.

Comment l’économie circulaire et la réparabilité des produits peuvent-elles être des solutions ?

L’économie circulaire crée un système économique performant qui mise sur :

  • l’utilisation durable des ressources ;
  • la réduction des déchets ;
  • la réparation des produits et leur recyclage en fin de vie.

 

La réparabilité, quant à elle, favorise la conception de produits facilement démontables. Elle garantit la disponibilité des pièces détachées. Elle est à l’origine d’initiatives telles que :

  • l’indice de réparabilité, qui informe les consommateurs sur la facilité de réparation des produits ;
  • les ateliers de réparation communautaires

 

Pourquoi est-il essentiel de lutter contre l’obsolescence programmée ?

Lutter contre l’obsolescence programmée permet de limiter l’impact environnemental associé au remplacement fréquent des produits. La fabrication de nouveaux biens génère une quantité importante de déchets et d’émissions de gaz à effet de serre. En prolongeant la durée de vie des produits, nous diminuons la pression sur les ressources naturelles et les écosystèmes.

De plus, les produits durables et réparables présentent des avantages économiques pour les consommateurs, car ils permettent de réduire les coûts à long terme. Les ménages modestes, en particulier, subissent la double punition des produits de mauvaise qualité et à durée de vie limitée.

Promouvoir la réparabilité, une consommation responsable et une économie circulaire peut contrer l’obsolescence programmée. Si vous êtes passionné par ces enjeux et souhaitez participer à la transition, découvrez notre école de commerce et développement durable. Rejoignez l’ESI Business School, et envisagez un avenir plus respectueux de l’environnement.